Malade ?... Faites
du sport
Le Monde.fr
avec AFP et Reuters | 06.11.2012 à 11h08 • Mis à jour le 06.11.2012 à 13h56 Par
Mustapha Kessous
Transpirer pour guérir, c'est une
vieille idée qui fait lentement son chemin. Mais une activité sportive
prescrite par un médecin, et donc remboursée par la Sécurité sociale, est-ce
une manière d'affirmer officiellement que la sueur est aussi un
médicament ?
C'est aujourd'hui le cas à
Strasbourg. La ville – en association avec l'agence régionale de santé
d'Alsace, le régime local d'assurance maladie, la préfecture et l'éducation
nationale –, a lancé, lundi 5 novembre, une expérimentation, pour une année,
appelée "Sport-santé sur ordonnance". Une cinquantaine de médecins
ont accepté de prescrire une activité sportive à leurs patients souffrant,
entre autres, de maladies chroniques, de diabète, d'obésité ou encore de
troubles cardiovasculaires. "Avec une ordonnance, le patient vient voir
l'éducateur détaché par la mairie, qui fera une évaluation de son état de
santé", a expliqué à l'AFP le Dr Alexandre Feltz, élu chargé de la
santé à Strasbourg et à l'origine du projet. "Il lui remettra ensuite
un coupon sport-santé lui permettant de s'inscrire gratuitement" aux
activités proposées, a-t-il précisé. La ville met ainsi deux cents vélos à
disposition, et propose des activités comme la natation, l'aviron ou encore la
marche nordique.
"Il ne s'agit pas de créer une
dépense supplémentaire pour la Sécurité sociale", souligne le maire PS de
Strasbourg, Roland Ries. Il a assuré que le coût de cette opération – environ
129 000 euros – serait totalement à la charge de la municipalité et de ses
partenaires, même si l'Académie de médecine a récemment recommandé dans un
rapport d'intégrer le sport à la liste des prescriptions médicales prises en
charge par la Sécurité sociale.
Environ 400 personnes devraient
bénéficier de l'expérimentation strasbourgeoise. "On est peut-être dans
une substitution, voire dans une économie, l'idée étant d'avoir des ordonnances
moins médicamenteuses", a ajouté M. Ries. Une entreprise consacrée au
sport-santé, l'Imaps, avait calculé qu'un investissement de 150 euros par an
consacré à une activité physique visant à soigner les pathologies de 10 % des
patients en affection de longue durée (ALD) permettrait à la Sécurité sociale
d'économiser 56,2 millions d'euros par an.
"REMBOURSER UN JOGGING"
Une initiative suivie de près au
niveau national. Daniel Bouffier, directeur régional de la jeunesse et des
sports en Alsace, a expliqué que "Sport-santé sur ordonnance"
rejoignait les préoccupations exprimées par les ministres de la santé et des
sports dans une communication en conseil des ministres, le 10 octobre dernier.
Lors de sa visite à l'Institut national du sport, de l'expertise et de la
performance (Insep), le 16 juillet, peu avant les Jeux olympiques de Londres,
le président de la république, François Hollande, avait évoqué cette idée que
les médecins pourraient prescrire davantage de sport que de médicaments.
Pendant les Jeux, la ministre des
sports, Valérie Fourneyron, n'a pas hésité à vanter les mérites de la culture
physique comme un palliatif naturel aux différents antibiotiques. Est-ce une
nouveauté ? "La santé, ce n'est pas que des médicaments, il y a
des médecins, des pionniers, qui ont déjà prescrit du sport sur
ordonnance", assure Stéphane Diagana. L'ancien champion du monde du
400 mètres haies travaille depuis plusieurs années sur la thématique
sport-santé et souhaite ouvrir un grand centre consacré à cette cause près de
Nice. Certaines associations, comme Passport Santé 62, située à Lens
(Pas-de-Calais), poussent leurs adhérents de plus de 50 ans à s'activer au lieu
de prendre des cachets.
Depuis 2008, cette association a
remarqué les effets bénéfiques de l'exercice sur des personnes atteintes de
diabète ou qui ont eu des accidents vasculaires cérébraux (AVC). "Une
activité sportive peut diminuer la résistance à l'insuline pour les
diabétiques, et donc réduire les dépenses de santé, affirme également
Stéphane Diagana. Selon lui, "le sport doit se mettre au service
de la santé. Nous avons trop une médecine de soin, et pas assez
préventive."
Les mutuelles suivent de près cette
thématique. "Il y a des alternatives aux médicaments", avait
affirmé Thierry Beaudet, le président de la MGEN, lors d'un colloque sur le
sport-santé en mars. Il avait d'ailleurs lancé au public qu'il préférait
"rembourser un jogging" qu'un médicament. L'enjeu est donc de
taille car le sport pourrait améliorer la santé, voire les comptes de la
Sécurité sociale. "Et les cotisations seront moins élevées",
avait dit M. Beaudet dans un sourire.
Mustapha
Kessous
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